GERMINAL, le classique de ÉMILE ZOLA

*Un raclement monta de sa gorge, il cracha noir. -Est-ce que c’est du sang ? Demanda
Étienne, osant enfin le questionner. Lentement, Bonnemort s’essuya la bouche d’un revers de main. -C’est du charbon…j’en ai dans la carcasse de quoi me chauffer jusqu’à la fin de mes jours.*

(Dans la série LES ROUGON-MACQUART #13, parution originale : 1878 chez Flammarion, collection Folio Classique, 640 pages. Éd. Num. 50 chef d’œuvre que vous devez lire avant de mourir)

À PROPOS DES ROUGON-MACQUART

LES ROUGON-MACQUART ou histoire naturelle et sociale d’une famille sous le second empire comptent vingt romans qui s’échelonnent de LA FORTUNE DES ROUGON (1871) au DOCTEUR PASCAL (1893). L’origine du projet remonte à 1868 alors que Zola part de l’idée d’un cycle qui se déploie en suivant l’arbre généalogique d’une famille.

Pour décrire LES ROUGON-MACQUART est encore je citerai  Maître Zola lui-même, dans un propos publié par Encyclopaedia Universalis : « Je ne veux pas peindre la société contemporaine, mais une seule famille, en montrant le jeu de la race modifiée par les milieux. Si j’accepte un cadre historique, c’est uniquement pour avoir un milieu qui réagisse ; de même le métier, le lieu de résidence sont des milieux…»

Les Rougon-Macquart #13 : GERMINAL

         

Etienne Lantier part, en pleine crise industrielle, dans le Nord de la France, à la recherche d’un emploi. Devenu mineur, il tombe amoureux de Catherine Maheu, maîtresse d’un autre ouvrier, Chaval. Etienne, endurant des conditions de travail inhumaines, voit sa conscience sociale s’affirmer. Lorsque la société minière baisse les salaires, il enjoint ses compagnons à se mettre en grève.

Le conflit est âpre et dur, l’arrivée des soldats en durcit le déroulement qui prend un tour sanglant. Lorsque, résignés, les mineurs reprennent le travail, la mine est sabotée : Etienne, Catherine et Chaval sont bloqués à l’intérieur. Etienne tue Chaval et devient enfin l’amant de Catherine, qui meurt dans ses bras avant l’arrivée des secours. Etienne part pour Paris, certain que son exigence de justice finira par triompher.

LES AURORES  DU SYNDICALISME
Qu’on dise un peu si les travailleurs avaient eu leur
part raisonnable, dans l’extraordinaire accroissement
de la richesse et du bien -être, depuis cent ans ?
On s’était fichu d’eux en les déclarant libres : Oui,
libres de crever de faim, ce dont ils ne se privaient guère.
(Extrait)

Germinal est un roman publié en 1878. C’est un drame social qui raconte l’histoire d’Étienne Lantier, un jeune homme un tantinet caractériel, en tout cas suffisamment pour avoir giflé son employeur à la suite d’une dispute. Lantier est viré, devient donc chômeur et décide de partir dans le nord de la France pour tenter sa chance dans les mines.

Il débarque à Montsou et tombera amoureux de Catherine. Cette amourette qui finira en triangle amoureux entretiendra disons la partie sentimentale de l’histoire. Pour moi ça ne présente pas grand intérêt et ça crée du remplissage pas toujours utile. C’est bien à ce niveau qu’il y a le plus de longueurs dans ce pavé de près de 700 pages.

Mais revenons à Étienne. Il se fait engager dans les mines de Montsou et est frappé rapidement par la vie de misère des travailleurs : des salaires de misère, des conditions de travail inhumaines, aucun égard pour la santé et encore moins la sécurité des travailleurs.

La misère était partout en particulier dans les regards et les estomacs. Etienne commença d’abord à s’interroger : *est-il possible qu’on se tuât à une si dure besogne dans ces ténèbres mortelles, et qu’on y gagnât même pas les quelques sous du pain quotidien…* (Extrait)

Puis il développa une conscience sociale plutôt révolutionnaire pour l’époque : *Le siècle ne pouvait s’achever sans qu’il y eût une autre révolution, celle des ouvriers cette fois, un chambardement qui nettoierait la société du haut en bas et qui la rebâtirait avec plus de propreté et de justice.* (Extrait)

Quand l’employeur décida de baisser les salaires, prétextant un contexte économique difficile, Lantier poussa les mineurs à la grève. La compagnie adopta une position inflexible et refusa toutes négociations.

Après des semaines de lutte, les mineurs, affamés, deviennent violents. Il y a des blessés…des morts. La compagnie ne bronche pas. L’estomac sclérosé, les mineurs se résignent à reprendre le travail dans des installations devenues extrêmement dangereuses suite au manque d’entretien.

Puis un ouvrier anarchiste sabote la mine. La galerie s’effondre, tuant de nombreux mineurs. Lantier voit sa belle Catherine mourir dans ses bras. Sorti vivant de cet enfer, Lantier retournera à Paris où il œuvrera à temps plein à l’organisation syndicale.

Il y a beaucoup de longueurs et un peu d’errance dans cette œuvre de Zola que je considère pourtant d’une incroyable actualité. Zola s’étend donc et ça lui ressemble, l’auteur ayant déjà une conscience de droit et de rectitude sociale très développé et ajoutons a cela un sens de la justice aiguisé comme il l’a démontré dans l’affaire Dreyfuss.

Aux longueurs il faut passer outre car dans la deuxième partie, comme se précisait la pensée de Lantier et son action par la suite, je suis devenu accro avec une montée rapide de la tension dramatique alors que les ouvriers affamés laissent éclater leur colère devenue aveugle et vont dans tous les sens.

Ce roman m’a ébranlé et je ne doute pas de sa crédibilité après la recherche que j’ai faite sur Zola qui s’est fortement documenté e portrait social de l’époque en France, les conditions dans les mines et l’avidité obscène des compagnies. Donc le roman est réaliste, l’intrigue est vigoureuse et l’auteur a évité le piège de l’exagération.

La misère décrite est noire. Quant au personnage central, Émile Lantier j’ai développé plus de compréhension sur ses motivations que d’attachement…. Toutefois, le personnage est gauche, extrémiste, un peu trop fier. Sa pensée philosophique est correcte mais sa façon de faire était inadéquate. L grève n’a servi à rien sinon à créer un inimaginable gâchis.

Bref, le roman est réaliste, l’écriture est puissante, le raccord avec notre société moderne est intéressant, l’ensemble est poignant et attractif. La finale est déchirante. Est-ce que Lantier pourrait rebâtir sur ses erreurs. Une suite serait intéressante » Toutefois le quatorzième volume des Rougon-Macquart s’intéresse à un peintre. Quant à GERMINAL, c’est définitivement un incontournable.

Emile Zola publie son premier ouvrage, « Contes à Ninon » à l’âge de vingt-quatre ans. Puis il se lance dans une carrière de journaliste engagé. Son premier succès, le roman « Thérèse Raquin », lui vaut de nombreuses critiques de la part de la presse.  Puis, Emile Zola entreprend une immense oeuvre naturaliste, « Les Rougon-Macquart, histoire d’une famille sous le second empire ».

Ce projet l’occupera pendant un quart de siècle. Chacune des oeuvres montre l’affrontement des forces naturelles, soumises aux circonstances et à l’environnement social, qui gouvernent le destin des personnages.

Avec toute son ardeur combattante, son courage et le poids de sa notoriété, Emile Zola s’engage dans l’affaire Dreyfus en publiant plusieurs articles dont son célèbre « J’accuse » dans le journal « L’Aurore » du 13 janvier 1898.

Séduit par les idées socialistes, Zola souhaite proposer des remèdes sous la forme d’une vision prophétique du devenir de l’homme dans ses « Quatre Évangiles : « Fécondité », « Travail », « Vérité ». Le quatrième, « Justice », vient d’être commencé, lorsqu’il meurt « accidentellement » asphyxié dans son appartement.

GERMINAL AU CINÉMA

Photo extraite de GERMINAL, adaptation cinématographique du livre d’Émile Zola GERMINAL, réalisé par Claude Berri, production franco-belge de 152 minutes sortie en 1993, avec Miou-Miou, Renaud, Gérard Depardieu et Jean Carmet.

Bonne lecture
Claude Lambert
vendredi 18 décembre 2020