LES CHRONIQUES DE LA FAUCHEUSE, Mickaël Druart

*…vous avez compris que chaque vie est un musée
qui dort en nous et réunit des pierres précieuses.
Chaque évènement, aussi insignifiant puisse-t-il être
constitue notre vie et en fait une grande œuvre.*
(Extrait : LES CHRONIQUES DE LA FAUCHEUSE,
Mickaël Druart, litl’book éditeur, 2018, format numérique,
et papier, 222 pages)

« Mortelles, Mortels, Peu avenante, la Grande Faucheuse jouit, depuis la nuit des temps, d’une réputation qui ternit, bien injustement, l’énergie d’hommes et de femmes qui s’évertuent, sans relâche, à prodiguer fauchages et agonies de qualité. Aussi, je vous prie de bien vouloir prendre connaissance, au travers du recueil qui suit, de leur quotidien, et des rencontres et péripéties qui le parsèment. Bien à vous, Josiane Smith, Secrétariat de la Grande faucheuse. P.S. : Pardonnez le sentimentalisme de ma secrétaire. Ce livre c’est mon best of, point barre. Vénérez-moi. Sa macabre majesté, La Grande Faucheuse. »

La mort qui narre
*Vous, mortels, qui aurez ce livre entre les amis :
il ne sera à vos yeux que l’invention d’un auteur
dont le nom n’aura été créé que pour couvrir mes
arrières. Peut-être, néanmoins, quelques puissent
être vos croyances, vous reconnaîtrez-vous dans
les pages noircies que je vous offre. *
(Extrait)

LES CHRONIQUES DE LA FAUCHEUSE est un enchaînement de 20 nouvelles pouvant se lire indépendamment mais l’ensemble est présenté sous forme de journal, avec comme thème central la mort, représentée dans l’imaginaire nord-américain par la faucheuse.

Selon wikipédia, Dans le folklore occidental moderne, la Mort est généralement représentée comme un squelette portant une robe, une toge noire avec capuche, et éventuellement avec une grande faux. La Mort est alors connue sous le nom de « la Grande Faucheuse » ou tout simplement « la Faucheuse ». Au thème de la mort s’ajoute un sous-thème non-négligeable : la transition vers l’après-vie qui suit la rencontre avec la faucheuse.

Ici, la mort est présentée comme une nécessité de la vie, un passage et surtout une institution avec son Président-directeur général : La grande Faucheuse, ses employés : les Faucheurs et Faucheuses, son bras droit Josianne, le classique des secrétaires indispensables et femme de l’ombre, un personnage récurrent dans tous les textes du livre.

Ce livre a été pour moi un véritable coup de cœur car il est porteur d’émotion, de tendresse et de délicatesse. Aucune violence ni approche négative. La mort n’y est pas présentée comme une finalité mais un passage qui donne tout son sens à la vie.

Il y a aussi une petite touche d’humour. Elle concerne dans la plus part des cas une dualité cocasse entre la Grande Faucheuse qui connait tout et Josianne qui ne connait rien et que le patron considère un peu comme une fainéante…elle qui est partout. Ce n’est pas méchant. En fait, il n’y a rien de méchant ou de négatif dans ce recueil. J’ai été touché et subjugué par la profondeur des textes. Chaque récit est une découverte.

Le thème est développé de façon décontractée, avec philosophie. Si la mort est démystifiée, la vie elle, est mise en valeur avec finesse subtilité et beaucoup d’imagination.

Une de mes nouvelles préférées raconte l’histoire de Clara White, capitaine d’un navire en perdition qui prend sous son aile un jeune garçon qu’elle appellera Elliot.

Pris dans une terrible tempête et sur le point de sombrer, le navire se met en marge du temps qui semble vouloir se figer pour permettre un dialogue. *-Je sais que notre mort prochaine et le miracle qui nous fait face doivent être mis de côté pour quelque chose de plus important. Alors, au travers du vent, je m’adresse dans un hurlement à la Capitaine médusée par la vague immobile. –Racontez-moi votre histoire ! * (Extrait)

J’ai compris alors que le jeune garçon n’était pas Elliot. Que pour mettre en perspective le meilleur d’une vie, la mort a besoin d’être touchée par elle. Au cours des récits, la mort prend différents aspects. J’ai trouvé intéressante la nouvelle sur le Tribunal des Morts. Chaque texte a un caractère particulier et dans tous les cas, l’auteur m’a accroché. Le livre n’est pas moralisateur mais il pousse doucement à réfléchir sur sa propre vie.

Chaque texte dégage comme une aura. J’ai trouvé tous les personnages attachants. Même la Faucheuse m’a semblé sympathique malgré ses airs de *je sais tout* prétentieux. Avec Josianne, la Faucheuse a donné à l’ensemble du recueil une agréable légèreté. Bien sûr, la mort reste un sujet grave mais la plume de Druart est tellement addictive qu’elle nous pousse à prendre cette nécessité avec philosophie.

Je trouverais même séduisante l’idée de rencontrer la Faucheuse à mon dernier moment pour jaser un peu et philosopher avec elle comme l’ont fait Clara White et Elliot dans la nouvelle intitulée LA FABULEUSE HISTOIRE DU PHÉNIX.

Il est rare que de dis ça d’un livre qui traitre de la mort, mais LES CHRONIQUES DE LA FAUCHEUSE m’ont fait du bien.

PROPOS AUTOBIOGRAPHIQUES DE L’AUTEUR
Professionnel de la petite histoire sur le coin d’une feuille, de la bonne idée nocturne oubliée au réveil, et des punchlines qui ne font rire que moi, je publie (malgré tout) mon premier livre aux Editions Boz’dodor en 2017. Aidé d’influences littéraires, cinématographiques et musicales, je crée depuis l’âge de sept ans des petites histoires qui ont conduit, à partir de seize ans, à la création de mes premiers romans.

Adepte des forums d’écriture, je finis néanmoins par m’essayer au format, plus adapté, de la nouvelle. Ainsi naissent les histoires d’une Grande Faucheuse cynique, de sa secrétaire, et du monde où se côtoient les âmes de défunts hauts en couleurs. Bref, les autobiographies, c’est pas mon truc.
Pardon pour tout. (Amazon)

Suggestion de lecture : LA MORT HEUREUSE de Hans Küng

Bonne lecture
Claude Lambert
Le dimanche 24 juillet 2022